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Rémunération « excessive » d’un dirigeant : quels sont les critères de cette « faute de gestion » impliquant de lourdes conséquences ?

Newsletter septembre 2016

Rémunération « excessive » d’un dirigeant : quels sont les critères de cette « faute de gestion » impliquant de lourdes conséquences ?

Le caractère excessif de la rémunération d’un dirigeant, susceptible de constituer une « faute de gestion » au sens du Code de Commerce, est soumis à un pouvoir concret d’appréciation par les juges. Une telle faute de gestion implique, lorsqu’elle est constituée, des conséquences potentiellement très lourdes financièrement et même pénalement.

 

La loi précise que les dirigeants d’une société peuvent être appelés, après un dépôt de bilan, à supporter tout ou partie de l’insuffisance d’actif de la société (même s’il s’agit d’une SA – SARL ou SAS), s’ils ont commis une faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance, ceci par application de l’article L 651-2 du Code de Commerce.

Ainsi, par exemple, dans une SA en liquidation judiciaire, la responsabilité du dirigeant dans l’insuffisance d’actif peut être recherchée en raison de la « faute de gestion » que constitue la perception par l’intéressé d’une rémunération annuelle jugée excessive et, éventuellement, le bénéfice d’un avantage en nature constitué par la mise à disposition d’un véhicule.

La Cour d’Appel saisie d’un tel dossier n’a pas retenu, dans l’hypothèse qui lui était soumise, la faute de gestion et le caractère excessif de la rémunération, celle-ci, selon la Cour, n’étant « pas disproportionnée au regard des salaires versés aux cadres de l’entreprise et des responsabilités exercées par le dirigeant » au sein de la société.

Mais cette décision a été très récemment censurée par la Cour de cassation, qui a reproché à la Cour d’Appel de ne pas avoir pris en considération les bons critères et de n’avoir pas recherché si la rémunération du dirigeant « n’était pas manifestement excessive au regard de la situation financière de la société ».

En effet, le montant de la rémunération des dirigeants de SA est en principe librement déterminé par l’organe social compétent. Toutefois, la Cour de Cassation rappelle que la rémunération du dirigeant doit être proportionnée à « la situation économique de l’entreprise », à sa capacité financière et ses résultats, ainsi, accessoirement, qu’à l’activité déployée par le dirigeant.

La rémunération qui, au regard de ces critères, devient excessive peut entraîner des sanctions patrimoniales pour faute de gestion sur le fondement des textes régissant les procédures collectives comme dans la décision rapportée, ou pénales pour banqueroute par détournement d’actif ou abus de biens sociaux.

Il ne convient donc pas de se contenter d’une comparaison de la rémunération du dirigeant avec celles des cadres de l’entreprise pour déterminer si le salaire du dirigeant est excessif ou non, ni de se contenter de tenir compte seulement de l’activité déployée par le dirigeant lui-même ou des responsabilités qui sont les siennes. Il est donc manifestement évident que, du point de vue financier et juridique, la situation du dirigeant d’entreprise est bien plus incertaine et risquée que celle de ses salariés.

De surcroît l’appréciation des juges en la matière est, par définition, emprunte de subjectivité et permet donc difficilement d’anticiper avec certitude pour un dirigeant si sa rémunération peut être considérée comme excessive ou pas. Ceci doit inciter évidemment à la plus grande prudence les organes sociaux au moment de fixer le montant de cette rémunération.

 

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