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20/12/2023 : À quel âge l’enfant peut-il décider ?

Voilà une question très fréquemment posée dans le secret des cabinets d’avocats dans l’hypothèse d’une séparation conflictuelle des parents, lorsqu’un enfant ne souhaite pas rendre visite au parent non-gardien.

La réponse à cette question est simple. Seul l’enfant majeur a le choix de rendre ou pas visite à ses parents. Étant majeur, rien ne pourra lui être imposé.

La réponse n’est pas la même pour un enfant mineur.

  • Si aucune décision de justice n’a été rendue fixant les droits des parents sur l’enfant, rien n’imposera à l’enfant mineur de se rendre au domicile de l’autre parent.

 Il faut toutefois rappeler que le Code civil prévoit que chaque parent doit respecter les liens de l’enfant avec l’autre parent.

Ainsi, si un juge aux affaires familiales était ultérieurement saisi et constatait que l’un des parents entrave les relations de l’enfant avec l’autre, il pourrait prendre cet élément en considération au moment de fixer la résidence de l’enfant chez l’un et l’autre de ses parents, autrement dit au moment de statuer sur sa « garde ».

Il est donc du devoir de chaque parent de veiller et d’encourager les relations de l’enfant avec l’autre parent.

  • La situation sera différente dans l’hypothèse où une décision a déjà été rendue par le juge aux affaires familiales fixant les modalités du droit de visite et d’hébergement du parent non-gardien.

Cette décision s’impose alors à l’enfant mineur et aux parents et l’enfant ne peut donc décider de ne pas aller chez le parent bénéficiaire du droit.

Le fait de ne pas respecter la décision de justice et de ne pas permettre l’exercice effectif du droit de visite et d’hébergement qui a été accordé par une décision de justice constitue une infraction et plus précisément un délit puni par la loi.

Le parent qui n’a pas permis l’exercice du droit de visite et d’hébergement ne pourra se retrancher derrière le fait que l’enfant mineur ne voulait pas aller chez son père.

Malgré le refus de l’enfant de se rendre chez l’autre parent, l’infraction de non-présentation d’enfant sera constituée. Le raisonnement est alors de considérer que le parent gardien n’a pas tout mis en œuvre pour permettre l’exercice du droit de visite et d’hébergement du parent non-gardien.

  • Si de réelles difficultés se posent dans l’exercice du droit de visite et d’hébergement qui expliquent le refus de l’enfant de visiter son parent, il conviendra que le parent gardien saisisse le juge aux affaires familiales pour tenter de faire modifier le droit de visite et d’hébergement.

Dans l’attente d’une décision de justice, il devra continuer de respecter le jugement rendu.

Dans le cadre de cette procédure, l’enfant mineur pourra solliciter son audition par le juge aux affaires familiales qui prendra la décision.

S’il est jugé capable de discernement, l’audition de l’enfant sera de droit.

Il pourra alors exprimer auprès du juge les raisons pour lesquelles il ne souhaite pas se rendre chez son parent.

Le juge aux affaires familiales devra tenir compte des éléments recueillis dans le cadre de l’audition de l’enfant pour prendre sa décision. En revanche, il n’est nullement tenu de suivre aveuglément le souhait de l’enfant.

On peut concevoir en effet que les raisons qui motivent le refus de l’enfant de se rendre chez l’un de ses parents ne soient pas suffisantes pour entraîner une modification du droit de visite et d’hébergement.

Par exemple, un enfant en pleine crise d’adolescence peut refuser de se rendre chez l’un de ses parents en raison des règles de conduite ou de comportement que celui-ci veut lui imposer.

Un enfant peut aussi être instrumentalisé par l’un des parents ou être pris dans un conflit de loyauté.

En cas de situation grave dans laquelle la sécurité ou la santé de l’enfant est compromise, il est conseillé de déposer immédiatement une plainte pénale et de saisir immédiatement le juge aux affaires familiales d’une demande de suppression du droit de visite et d’hébergement accordé.

Même dans une telle hypothèse, l’infraction de non-présentation d’enfant est constituée lorsque l’enfant n’est pas présenté au parent qui veut exercer son droit, de sorte que le parent gardien n’aura jamais la certitude qu’il ne sera pas inquiété pour ne pas avoir respecté la décision de justice rendue.

Signalons encore qu’il est quasiment impossible d’obtenir la suppression pure et simple d’un droit de visite et/ou d’hébergement au bénéfice d’un parent, même dans l’hypothèse où la sécurité ou de la santé de l’enfant est compromise.

Dans une telle hypothèse, le juge peut mettre en place un droit de visite en lieu neutre, de sorte que ce droit s’exercera dans les locaux d’une association habilitée à cette fin et en présence d’un tiers qui veillera à ce que l’enfant ne soit pas en danger avec son parent et, de manière plus générale, aux conditions d’exercice de ce droit de visite.

On le voit ici l’enfant mineur ne peut jamais « choisir » et décider de ne plus voir l’un de ses parents.

Le juge aux affaires familiales compétent peut décider des modalités les plus adéquates à mettre en œuvre pour permettre à l’enfant de maintenir des liens avec ses deux parents dans un contexte optimal de santé et de sécurité.

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