Il arrive souvent qu’un employeur, contraint de licencier un salarié, souhaite le prévenir avant notamment lorsqu’il s’agit d’un licenciement économique d’un salarié avec qui les relations étaient bonnes.
Si l’on peut comprendre la démarche, elle peut s’avérer très dangereuse.
La Cour de Cassation l’a rappelé dans une décision du 3 Avril 2024.
Dans cette affaire, le jour de l’envoi de sa lettre de licenciement, un salarié est informé verbalement de son licenciement lors d’une conversation téléphonique avec la DRH de l’entreprise ; l’employeur ayant estimé qu’il était convenable de prévenir l’intéressé de son licenciement, pour lui éviter de se présenter à une réunion et de se voir congédier devant ses collègues de travail…
Humainement, la décision de prévenir le salarié semblait de bon sens.
Pour autant, cela entrainera une condamnation de l’employeur : le licenciement sera jugé comme étant verbal et donc dépourvu de cause réelle et sérieuse
Si la démarche est louable sur le plan humain, elle doit être utilisée avec une grande précaution en raison des conséquences possibles sur le plan juridique.
Bon nombre d’employeurs ont regretté d’avoir opté pour une telle démarche ; celle-ci ayant été ultérieurement sanctionnée par une décision de justice.
Les dispositions légales rappellent que la décision de licenciement est notifiée au salarié par lettre recommandée avec avis de réception.
C’est l’envoi de ce courrier recommandé qui manifeste la volonté de l’employeur de mettre fin au contrat de travail, et qui acte la rupture du contrat de travail (quand bien même le préavis, lui, ne commence à courir qu’au jour de la première présentation du courrier recommandé au domicile du salarié).
Par conséquent, si l’annonce orale du licenciement est faite au salarié avant que le courrier de licenciement ne soit expédié, la rupture s’assimile à un licenciement verbal et donc à un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Dans une autre affaire, un employeur avait été condamné pour avoir informé oralement le salarié de l’envoi de la lettre de licenciement, dans l’objectif de lui indiquer qu’il n’était pas nécessaire qu’il se présente à son poste le lendemain.
La Cour de cassation a alors estimé que le juge devait établir la chronologie des évènements pour déterminer si le courrier recommandé, manifestant la volonté de l’employeur de mettre fin au contrat de travail, avait été expédié :
- Avant l’appel téléphonique d’information, la procédure de licenciement ayant dans ce cas été respectée
- Après, le licenciement étant alors jugé comme « verbal » et donc dépourvu de cause réelle et sérieuse.
L’intention, parfois louable, peut donc être très risquée pour l’employeur.
La discrétion est donc la règle tant que le courrier de licenciement n’a pas été expédié.
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