Tout manquement de l’agent public à ses obligations professionnelles, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, l’expose à une sanction disciplinaire.
Avant d’engager des poursuites disciplinaires, l’employeur n’a pas l’obligation de diligenter une enquête administrative. Néanmoins, statistiquement elle a lieu et constitue une étape clef de la procédure.
Les enjeux de l’enquête administrative
Pour pouvoir sanctionner valablement les manquements commis par un fonctionnaire, l’administration doit s’assurer de la matérialité des faits reprochés. Cela peut consister à entendre des agents, recueillir des attestations, tenir des audits, contrôler des documents administratifs…
Face à des accusations de collègues ou d’usagers du service public par exemple, l’enquête vise à démêler le vrai du faux. Il arrive qu’il en ressorte n’y avoir lieu à poursuites et l’agent peut alors se retourner pénalement contre ses accusateurs, pour dénonciation calomnieuse ou faux témoignage selon les cas.
L’employeur doit également évaluer si les faits caractérisent bien une faute et adapter la sévérité de la sanction en fonction de la gravité.
Là encore l’enquête administrative est cruciale pour permettre une appréciation exempte d’erreur, dont l’employeur aurait à répondre devant le juge administratif, qui contrôle la proportionnalité des sanctions disciplinaires infligées.
L’enquête permet aussi de déterminer s’il y a lieu d’écarter temporairement l’agent du service jusqu’à ce que la sanction intervienne, par une suspension temporaire de fonctions, à titre conservatoire, au vu d’une faute grave présentant un caractère de vraisemblance suffisante.
Hormis s’il envisage de prendre une sanction du 1er groupe, l’employeur a l’obligation de consulter le Conseil de discipline avant de prendre sa décision. Les conclusions de l’enquête, généralement reprises dans le rapport de saisine, pourront éclairer l’organe consulté sur le contexte des poursuites et le guider dans son avis.
Dans la mesure où l’enquête n’est pas obligatoire, le fonctionnaire n’a aucun moyen d’exiger qu’il en soit diligenté une, a rappelé le Conseil d’Etat. Ce sera à l’employeur d’assumer l’illégalité d’une sanction intervenue sur des faits inexacts.
La transmission du contenu de l’enquête
A partir du moment où l’administration utilise les informations issues d’une enquête pour engager la procédure disciplinaire, les droits de la défense commandent que l’agent puisse en prendre connaissance pour les critiquer utilement.
Il est ainsi prévu que l’agent se voit communiquer l’intégralité de son dossier individuel et tous les documents annexes, s’il le demande, après avoir été averti de ce droit par son employeur.
Le Code général de la fonction publique, à l’instar des textes statutaires qu’il est venu refondre en 2022, ne comporte aucune disposition relative à l’enquête. C’est uniquement la jurisprudence qui est venue éclairer l’employeur sur les modalités à respecter.
La question de la communication du contenu de l’enquête revient fréquemment devant le Conseil d’Etat, signe qu’il n’est pas simple d’appréhender celle-ci.
En 2020, il précisait que l’agent peut en principe obtenir communication des procès-verbaux des témoignages collectés durant l’enquête, en plus du rapport lui-même, sauf si cette communication serait de nature à porter gravement préjudice aux personnes qui ont témoigné.
En 2022, il considérait que malgré l’absence de communication des PV d’audition réalisés durant l’enquête disciplinaire, l’agent ne peut pas reprocher à l’employeur de ne pas avoir pu consulter l’intégralité de son dossier s’il n’a pas fait la demande de communication des pièces dont il connaît l’existence (une liste des annexes avait été jointe au rapport d’enquête).
Très récemment, il revenait quelque peu sur la jurisprudence de 2020.
Après avoir rappelé que l’administration doit informer l’agent de façon suffisamment circonstanciée de la teneur du dossier disciplinaire, de sorte qu’il puisse se défendre utilement, la Haute juridiction constate que le rapport final de l’enquête a été transmis dans une version dont certaines parties avaient été occultées, y compris dans leur intitulé, et remplacées par la mention « partie non communicable – article L.311-6 CRPA ». Elle observe que l’agent avait demandé communication des PV mais ne les avait pas tous eus.
Le Conseil d’Etat conclut que, quand bien même il s’agirait de protéger les personnes qui avaient témoigné, il y a lieu de considérer que l’agent n’a pas eu communication des éléments qu’il était en droit d’attendre pour préparer utilement sa défense. La procédure est donc entachée d’irrégularité.
A noter : cette solution concerne tout agent public faisant l’objet d’une mesure prise en considération de sa personne, justifiée ou non par l’intérêt du service. L’agent doit être mis à même d’obtenir communication de son dossier même hors contexte disciplinaire.
Les avocats du cabinet Action-Conseils assistent régulièrement les agents publics à l’occasion de procédure disciplinaire.
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Si vous travaillez dans le secteur privé, consultez notre article sur la validité des témoignages anonymes devant le Conseil de Prud’hommes.