Le principe de libre concurrence s’applique au monde des affaires.
Toute entreprise doit, en effet, être libre de rechercher des clients parce qu’il s’agit pour elle d’une véritable nécessité pour vivre et se développer.
Seule la concurrence déloyale est interdite parce qu’elle fausse le jeu de la concurrence.
Tout acte déloyal de concurrence sera constitutif d’une faute au sens des dispositions du Code civil et si cette faute cause un préjudice, la victime pourra solliciter des dommages-intérêts en réparation de son préjudice, mais également solliciter la cessation de tous agissements déloyaux.
Un intéressant arrêt rendu en début d’année 2025 par la Cour d’Appel de Toulouse illustre la difficulté pour le demandeur à l’action en concurrence déloyale d’apporter la preuve d’un acte déloyal commis par le défendeur à l’appui de ses demandes.
Dans l’affaire qui était soumise à la Cour d’Appel, une société d’assurance était titulaire d’un portefeuille de courtage qui avait pu être développé grâce à la mise en place d’un démarchage téléphonique.
Les contrats conclus étaient placés auprès d’une société tierce par l’entremise d’un interlocuteur travaillant en son sein.
Ce dernier a par la suite créé sa propre société de courtage en assurance et a donc mis fin à son contrat de travail avec cette société tierce.
Par la suite, la société d’assurance initiale avait perdu plusieurs clients ; ce qu’elle attribuait à une activité de démarchage de la société nouvellement créée. Elle avait donc assigné celle-ci devant le Tribunal de commerce de Toulouse et sollicitait la réparation de son préjudice.
Le tribunal de commerce saisi avait fait droit à ses demandes. Appel avait été interjeté par la société défenderesse condamnée.
La demanderesse à la procédure indiquait qu’elle avait fait l’objet d’actes déloyaux en ce sens où son fichier client lui avait été volé. La preuve en étant que la société défenderesse ne pouvait s’être trouvée en possession d’informations sur ses clients que de cette manière.
Quant à la société défenderesse, elle se défendait en soutenant qu’elle avait eu recours à un prestataire extérieur disposant de ses propres fichiers clients et qu’elle n’avait en aucun cas commis un vol des fichiers de la société demanderesse.
La Cour d’Appel de Toulouse n’a pas suivi le Tribunal de Commerce en son argumentation et a rejeté les prétentions de la société demanderesse.
Elle a, en effet, jugé que la société demanderesse à qui incombait la charge de la preuve de l’existence du vol de fichiers allégué, était défaillante à le faire.
Pour elle, quand bien même la société demanderesse produisait un constat d’huissier démontrant la concordance pour plus de 400 clients entre son listing de clients et le listing de clients de la société défenderesse nouvellement créée, cela ne suffisait pas à établir le vol du fichier.
Cette liberté de concurrence implique également une liberté de démarchage qui n’est pas limitée, quand bien même la personne qui s’y livrerait aurait auparavant travaillé pour la société se disant victime, sauf clause de non- démarchage prévue dans le contrat de travail.
Cependant, si le démarchage est rendu possible par le vol du fichier clients, il y aura acte de concurrence déloyale et faute au sens des dispositions du Code civil.
Rappelons à cet égard que la Cour de cassation a été ramenée en 2022 à rappeler que l’appropriation d’informations confidentielles relatives à l’activité d’un concurrent et de sa clientèle constitue une manœuvre déloyale qui peut être sanctionnée au titre de la concurrence déloyale.
Tel est bien évidemment le cas d’un vol de fichiers clients.
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