Les technologies modernes sont de plus en plus intrusives dans la vie privée des salariés.
La géolocalisation des véhicules confiés aux salariés devient fréquente mais la légalité de tels systèmes répond à des règles strictes, dans la mesure où il s’agit d’un contrôle de l’activité des salariés.
L’utilisation de ce dispositif de géolocalisation est susceptible de porter atteinte à la liberté d’aller et de venir et à la vie privée, dans la mesure où il permet de connaître avec précision les itinéraires des conducteurs des véhicules.
Le cabinet fait le point sur le cadre juridique.
Quelles sont les obligations générales ?
Dans la mesure où il s’agit d’un traitement de données à caractère personnel, le respect des obligations issues du RGPD (règlement général des données personnelles) est essentiel notamment sur les points suivants : système d’autocontrôle continu, tenue d’un registre des activités de traitement, désignation d’un délégué à la protection des données, etc…
Le système de géolocalisation doit également être inscrit au registre des activités de traitement tenu par l’employeur.
Le système de géolocalisation doit par ailleurs respecter un ensemble de finalités (certaines étant autorisées et d’autres non).
Quelles sont les finalités autorisées ?
- Respect d’une obligation légale ou réglementaire imposant la mise en œuvre d’un dispositif de géolocalisation en raison du type de transport ou de la nature des biens transportés ;
- Suivi et facturation d’une prestation de transport de personnes ou de marchandises ou d’une prestation de services directement liée à l’utilisation du véhicule ainsi que la justification d’une prestation auprès d’un client ou d’un donneur d’ordre, par exemple l’activité d’ambulances auprès de la CPAM ;
- Sûreté ou sécurité des salariés, des marchandises ou véhicules notamment en cas de vol ;
Le traitement peut avoir pour finalité également le suivi du temps de travail, lorsque ce suivi ne peut être réalisé par un autre moyen, sous réserve notamment de ne pas collecter ou traiter de données de localisation en dehors du temps de travail des employés concernés.
Quelles sont les finalités exclues ?
Un dispositif de géolocalisation installé dans un véhicule mis à la disposition d’un employé ne peut pas être utilisé pour contrôler le respect des limitations de vitesse, ni pour contrôler un employé en permanence.
Il ne peut pas non plus être utilisé dans le véhicule d’un employé disposant d’une liberté dans l’organisation de ses déplacements, comme les cadres ou les commerciaux.
Il ne peut pas être utilisé pour suivre les déplacements des représentants du personnel dans le cadre de leur mandat, ni pour collecter la localisation en dehors du temps de travail (trajet domicile/lieu de travail, temps de pause, etc.), y compris pour lutter contre le vol ou vérifier le respect des conditions d’utilisation du véhicule.
Il ne peut pas davantage être utilisé pour calculer le temps de travail des employés alors qu’un autre dispositif existe déjà.
La Cour de cassation a jugé que « l’utilisation d’un système de géolocalisation pour assurer le contrôle de la durée du travail n’est licite que lorsque ce contrôle ne peut pas être fait par un autre moyen et n’est pas justifiée lorsque le salarié dispose d’une liberté dans l’organisation de son travail ».
Qui peut avoir accès aux données de géolocalisation ?
Il n’y qu’un nombre restreint de salariés qui doivent pouvoir accéder aux données à caractère personnel traitées dans le cadre d’un dispositif de géolocalisation, et notamment :
- Les personnes en charge de coordonner, de planifier ou de suivre les interventions
- Les personnes en charge de la sécurité des biens transportés ou des personnes
- Le responsable des ressources humaines
Un système de gestion des habilitations, régulièrement mis à jour, doit être mis en œuvre pour garantir que les personnes habilitées n’ont accès qu’aux seules données effectivement nécessaires à la réalisation de leurs missions.
Même si les logiciels sont fournis par des prestataires, leur utilisation reste sous la responsabilité de l’employeur.
Combien de temps peut-on conserver les données ?
Les données relatives à la localisation ne peuvent ainsi être conservées que pour une durée pertinente au regard de la finalité du traitement qui a justifié la collecte.
Il est considéré qu’une durée de 2 mois est une durée raisonnable sauf si :
- Une disposition légale le prévoit ;
- Une telle conservation est rendue nécessaire à des fins de preuve de l’exécution d’une prestation, lorsqu’il n’est pas possible de rapporter cette preuve par un autre moyen. Dans ce cas, la durée de conservation est fixée à un an.
- La conservation est effectuée pour conserver un historique des déplacements à des fins d’optimisation des tournées, pour une durée maximale d’un an.
Si le système sert au suivi du temps de travail (dans le cas où il ne peut être assuré par un autre moyen), seules les données relatives aux horaires effectués peuvent être conservées pendant une durée de 3 ans.
Le procédé ne doit pas être clandestin.
Les salariés doivent être informés, préalablement à la mise en œuvre, de l’identité du responsable de traitement ou de son représentant, de la finalité poursuivie par le traitement, de la base légale du dispositif., des destinataires ou catégories de destinataires des données, de l’existence d’un droit d’accès aux données les concernant enregistrées par l’outil, d’un droit de rectification et d’un droit d’opposition pour motif légitime, de la durée de conservation des données et de la possibilité d’introduire une réclamation auprès de la CNIL.
Les salariés doivent également avoir la possibilité de désactiver la fonction de géolocalisation des véhicules, en particulier à l’issue de leur temps de travail ou pendant leurs temps de pause.
Enfin, un tel dispositif doit faire préalablement l’objet d’une consultation du CSE.
Il convient donc d’être particulièrement vigilant dans la mise en place et l’utilisation d’un système de géolocalisation.