Lorsque les parents mettent en place une résidence alternée sur leurs enfants après leur séparation ou leur divorce, la question se pose alors de savoir quelles incidences cette résidence alternée a sur le versement des prestations familiales.
Rappelons que figurent, au titre des prestations familiales :
- Les allocations familiales
- La prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE)
- Le complément familial
- Les aides personnelles au logement
- L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé
- L’allocation de soutien familial
- L’allocation de rentrée scolaire
- L’allocation journalière de présence parentale.
Il faut distinguer le sort des allocations familiales de celui des autres prestations familiales.
Un sort spécifique réservé aux allocations familiales
Le principe posé par l’article R513-1 du code de sécurité sociale est celui de l’allocataire unique, c’est-à-dire que le droit aux prestations familiales n’est reconnu qu’à une seule personne au titre d’un même enfant.
Seules les allocations familiales, à l’exception des autres prestations familiales, peuvent faire l’objet d’un partage entre les parents.
Pour ces seules allocations familiales, les parents pourront désigner un allocataire unique qui bénéficiera seul des allocations familiales ou, au contraire, s’entendre pour décider du partage desdites allocations.
La caisse d’allocations familiales appliquera alors l’accord qui lui a été notifié par les parents.
Le Code de la sécurité sociale prévoit un allocataire unique pour les autres prestations familiales
En l’état de la réglementation, la règle de l’allocataire unique demeure applicable pour les autres prestations familiales. Il n’est donc pas possible d’envisager un partage desdites prestations.
Les parties pourront s’entendre pour désigner d’un commun accord, l’un d’entre eux en qualité d’allocataire.
Cependant, si aucun accord entre eux n’intervient, la solution était, en l’état, incertaine.
Pour illustrer les difficultés actuelles qui se posent, il suffit de voir le sort du complément de libre choix de mode de garde qui est l’une des prestations d’accueil du jeune enfant.
En effet, l’administration sociale considère que la règle de l’unicité de l’allocataire s’applique à cette prestation familiale, de sorte que seul le parent allocataire peut prétendre au complément mode de garde, mais uniquement pour les périodes au cours desquelles il est employeur de l’assistante maternelle ou de la garde à domicile, sans que l’autre parent ne puisse prétendre à la perception de la moindre aide pour les périodes au cours desquelles il est lui-même employeur.
Pour contourner le problème, la seule solution en l’état est d’inviter les parents à demander l’alternance de la qualité d’allocataire pour le bénéfice du complément de libre choix du mode de garde.
Les décisions de la Cour de Cassation et du Conseil d’Etat
La Cour de Cassation s’était déjà prononcée favorablement, par un avis rendu le 26 juin 2006 puis par un arrêt de du 3 juin 2010, en faveur de la mise en place d’un dispositif d’allocataire par alternance en fonction de la situation respective de chacun des parents et des règles particulières à chaque prestation familiale.
Le Conseil d’Etat vient de rendre sur cette question une décision intéressante le 19 mai 2021.
Il a rappelé que le législateur a entendu, dans le cadre de l’article L. 513 – 1 du code de la sécurité sociale, lié l’attribution des prestations familiales au nombre desquels figure la prestation d’accueil du jeune enfant comprenant le complément du libre choix du mode de garde, à la charge effective et permanente de l’enfant.
Le Conseil d’Etat considère que, dès lors qu’une résidence alternée ait mise en place de manière effective et équivalente entre les parents, l’un et l’autre de ses parents doivent être considérés comme assumant la charge effective et permanente de leur enfant au sens de ces dispositions.
Le Conseil d’Etat a donc considéré que l’attribution d’une prestation familiale ne saurait être refusée à l’un des deux parents au seul motif que l’autre parent en bénéficie, sauf à ce que les règles particulières à cette prestation fixées par la loi y fassent obstacle ou à ce que l’attribution de cette prestation à chacun d’entre eux implique la modification ou l’adoption de dispositions relevant du domaine de la loi.