De plus en plus souvent, lors de leur séparation ou de leur divorce, les parents mettent en place une résidence alternée sur leurs enfants.
La question se pose alors de savoir quelles incidences cette résidence alternée a sur le versement des prestations familiales, allocations familiales ou supplément familial de traitement pour les fonctionnaires.
Rappelons que figurent, au titre des prestations familiales, :
- Les allocations familiales
- La prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE)
- Le complément familial
- Les aides personnelles au logement
- L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé
- L’allocation de soutien familial
- L’allocation de rentrée scolaire
- L’allocation journalière de présence parentale.
Un sort spécifique réservé aux allocations familiales
Le principe posé par le code de sécurité sociale est celui de l’allocataire unique, c’est-à-dire que le droit aux prestations familiales n’est reconnu qu’à une seule personne au titre d’un même enfant.
Une exception à cette règle est posée par l’article L. 521 – 2 du code de la sécurité sociale en cas de résidence alternée du ou des enfants.
C’est ainsi que seules les allocations familiales, à l’exception des autres prestations familiales, pourront faire l’objet d’un partage entre les parents.
Ainsi l’article R. 521 – 2 du code de la sécurité sociale prévoit que les allocations familiales seront versées conformément à l’accord intervenu entre les parents.
Ceux-ci pourront ainsi désigner un allocataire unique qui bénéficiera seul des allocations familiales ou, au contraire, s’entendre pour décider du partage desdites allocations.
La caisse d’allocations familiales appliquera alors l’accord qui lui a été notifié par les parents.
Les modalités de versement qui auront été convenues entre les parents s’appliqueront pour une année, sauf modification des modalités de résidence du ou des enfants entre-temps.
Dans l’hypothèse où les parents ne seraient pas d’accord sur les modalités de versement des allocations familiales, celles-ci seront partagées à hauteur de moitié entre les parents.
Un allocataire unique pour les autres prestations familiales
La règle de l’allocataire unique demeure applicable pour les autres prestations familiales. Il n’est donc pas possible d’envisager un partage desdites prestations.
Les parties pourront s’entendre pour désigner d’un commun accord, l’un d’entre-eux en qualité d’allocataire.
Cependant, si aucun accord entre eux n’intervient, la solution est, en l’état, incertaine.
Par une réponse ministérielle en date du 28 mai 2019, le ministre des solidarités et de la santé qui avait été interrogé sur le sort des prestations familiales, hors allocations familiales, en cas de résidence alternée avait indiqué qu’elles ne pouvaient être partagées en application de la règle de l’unicité de l’allocataire.
Le ministre considérait donc que l’enfant devait être rattaché administrativement à l’un ou l’autre de ses parents désigné comme allocataire unique indépendamment du temps qu’il passait réellement auprès de l’un ou de l’autre.
Il rappelait, toutefois, que les parents avaient la possibilité de demander conjointement une alternance de l’allocataire après une période minimale d’un an.
La Cour de cassation s’était déjà prononcée favorablement, par un avis rendu le 26 juin 2006 puis par un arrêt de du 3 juin 2010, en faveur de la mise en place d’un dispositif d’allocataire par alternance en fonction de la situation respective de chacun des parents et des règles particulières à chaque prestation familiale.
Pour illustrer les difficultés actuelles qui se posent, il suffit de voir le sort du complément de libre choix de mode de garde qui est l’une des prestations d’accueil du jeune enfant.
En effet, l’administration sociale considère que la règle de l’unicité de l’allocataire s’applique à cette prestation familiale, de sorte que seul le parent allocataire peut prétendre au complément mode de garde, mais uniquement pour les périodes au cours desquelles il est employeur de l’assistante maternelle ou de la garde à domicile, sans que l’autre parent ne puisse prétendre à la perception de la moindre aide pour les périodes au cours desquelles il est lui-même employeur.
Pour contourner le problème, la seule solution en l’état est d’inviter les parents à demander l’alternance de la qualité d’allocataire pour le bénéfice du complément de libre choix du mode de garde.
Une réforme à venir ?
Le défenseur des droits s’est emparé récemment de cette question et a estimé que le refus de versement des prestations familiales à l’un des parents dont l’enfant est en résidence alternée était susceptible de constituer une atteinte à l’intérêt supérieur de l’enfant.
Sans doute conscient de la difficulté, dans sa réponse de 2019, le ministre du travail et de la solidarité n’excluait pas une réforme du système afin de dégager une solution équitable entre toutes les familles quelle que soit leur situation familiale ou le mode de résidence choisi pour l’enfant après la séparation.
On le voit, la question du versement des prestations familiales, hors allocations familiales, aux parents dont les enfants font l’objet d’une résidence alternée est aujourd’hui extrêmement incertaine.
Espérons qu’une réforme interviendra prochainement qui permettra à chaque parent qui assume la charge effective et permanente d’enfants en alternance de pouvoir se voir attribuer partie des prestations familiales du chef de ces enfants.
C’est chose faite pour le supplément familial de traitement.
Du nouveau pour le supplément familial de traitement
Un décret tout récent du 10 novembre 2020 met en œuvre le partage du supplément familial de traitement en cas de résidence alternée de l’enfant au domicile de chacun des parents.
Ce partage s’inspire de celui des allocations familiales.
Ce partage n’est que facultatif en ce qu’il n’interviendra qu’en cas de demande conjointe des parents.
Là encore, ce choix qui est fait ne pourra être remis en cause dans l’année sauf changement du mode de résidence de l’enfant.
Lorsque les deux parents sont fonctionnaires, l’un des parents pourra demander que le supplément familial de traitement soit calculé selon l’indice de son ex-conjoint s’il est plus élevé.