Un dirigeant qui a appauvri l’entreprise dans son intérêt personnel peut être condamné à combler l’intégralité du passif de la société, mise en liquidation judiciaire, même si ses fautes ne sont à l’origine que d’une partie de cette insuffisance.
A la différence du droit commun de la responsabilité civile qui exige réparation de l’entier préjudice résultant de la faute commise et donc une adéquation entre faute et préjudice, le droit des procédures collectives confie au juge le pouvoir d’apprécier le montant de l’insuffisance d’actif à mettre à la charge du dirigeant, de droit ou de fait, à raison des fautes commises ayant contribué à cette insuffisance (Code de Commerce article L. 651-2).
C’est pourquoi, sous réserve que le montant de la condamnation n’excède pas le montant total du passif, un juge peut valablement mettre à la charge du dirigeant la totalité de l’insuffisance d’actif même si la faute de ce dernier n’est à l’origine que d’une partie de cette insuffisance.
Un arrêt de la Cour de Cassation en date du 20 avril 2017 confirme ce principe.
Condamné à combler l’intégralité du passif d’une société en liquidation judiciaire et interdit de gérer pour une durée de cinq ans, le dirigeant de fait d’une société a considéré cette condamnation disproportionnée. Il a soutenu que le lien de causalité entre ses fautes de gestion et le montant de l’intégralité de l’insuffisance d’actif n’était pas établi, et que l’imputabilité d’une partie de cette insuffisance aux fautes du gérant de droit n’a pas été recherchée.
Après avoir fermement rappelé que le dirigeant, de droit ou de fait, « peut être déclaré responsable, sur le fondement de l’article L. 651-2 du Code de Commerce, même si la faute de gestion qu’il a commise n’est que l’une des causes de l’insuffisance d’actif et sans qu’il y ait lieu de déterminer la part de cette insuffisance imputable à sa faute », la Cour de Cassation a approuvé les condamnations prononcées par la cour d’appel.
Elle a relevé que les juges d’appel ont retenu des fautes de gestion justifiées (rémunération excessive au regard de la situation économique de l’entreprise, factures impayées non recouvrées etc… ) et les ont imputées au gérant de fait.
De surcroît, la décision de la cour d’appel est approuvée par la Cour de Cassation en ce qu’elle a écarté du monde des affaires un dirigeant « qui avait appauvri l’entreprise dans son intérêt personnel ».