Actualité

07/10/2024 : Les contours de la responsabilité civile des père et mère

La question de la responsabilité civile des père et mère du fait du dommage causé par leur enfant est envisagée à l’article 1242 alinéa 4 du Code civil en ces termes :

« Le père et la mère, en tant qu’ils exercent l’autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux. »

 

 Pas de responsabilité civile des parents du fait de leurs enfants majeurs

 

Immédiatement, on comprend que le père et la mère ne seront pas solidairement responsables du dommage causé par leur enfant majeur, quand bien même cet enfant vivrait à leur domicile.

Autrement dit si l’enfant majeur cause un préjudice à un tiers il sera seul tenu d’indemniser cette victime et les parents ne seront pas tenus de « mettre la main à la poche ».

La responsabilité civile des parents n’est envisagée que pour les enfants mineurs.

 

Responsabilité civile solidaire : qu’est-ce que ça veut dire ?

 

Cette responsabilité civile des parents signifie que la victime pourra solliciter une condamnation solidaire des père et mère à l’indemniser du préjudice causé par les agissements de l’enfant mineur.

Autrement dit, bénéficiant d’une condamnation solidaire, la victime pourra se tourner vers l’un ou l’autre des parents (généralement le plus solvable) pour obtenir le règlement de l’intégralité des sommes qui lui ont été allouées.

 

Mais dans quelles hypothèses les parents sont-ils responsables solidairement ?

 

L’article 1242 alinéa 4 du Code civil pose le principe que les père et mère sont solidairement responsables du dommage causé par leur enfant dès lors que celui-ci habite avec eux et qu’ils exercent conjointement l’autorité parentale.

Ainsi, cet article n’envisageait que la situation de parents élevant ensemble leur enfant. En ce cas, la responsabilité civile des parents était une évidence.

La jurisprudence confrontée à l’hypothèse de parents séparés de sorte que l’enfant n’habitait qu’avec l’un d’eux, avait donc dû interpréter la notion de cohabitation.

 

L’ancienne position de la Cour de cassation

C’est ainsi que la Cour de cassation jugeait qu’en cas de séparation des parents, la condition de cohabitation n’était remplie qu’à l’égard du parent chez lequel la résidence habituelle de l’enfant avait été fixée par le juge aux affaires familiales.

Ainsi, seul le parent chez qui la résidence de l’enfant avait été fixés par le juge voyait sa responsabilité civile engagée quand bien même, l’autre parent était titulaire de l’autorité parentale et bénéficiait d’un droit de visite et d’hébergement.

Le comble était que seule la responsabilité civile du parent chez qui la résidence de l’enfant était fixée était retenue quand bien même le fait dommageable de l’enfant avait eu lieu pendant l’exercice par l’autre parent de son droit de visite et d’hébergement.

Cette jurisprudence posait par ailleurs d’autres difficultés dans l’hypothèse où la résidence de l’enfant était fixé de manière alternée au domicile de l’un et l’autre de ses parents, ou encore lorsque les parents s’étaient entendus sur le lieu de résidence de l’enfant sans saisir le juge aux affaires familiales.

Une telle application des dispositions du Code civil entravait par ailleurs la volonté d’une meilleure indemnisation des victimes.

En outre, elle allait à l’encontre du principe de coparentalité posé par la loi du 4 mars 2002.

Pas étonnant dès lors que la Cour de cassation ait opéré un revirement de jurisprudence.

 

Le revirement de jurisprudence de la Cour de cassation

La Cour de cassation juge désormais que :

  • La notion de cohabitation est la conséquence de l’exercice conjoint de l’autorité parentale, laquelle emporte pour chacun des parents, un ensemble de droits et de devoirs
  • Leur cohabitation avec un enfant mineur à l’égard duquel ils exercent conjointement l’autorité parentale ne cesse que lorsque des décisions administratives ou judiciaires confient ce mineur un tiers.

 

Il en résulte que les deux parents lorsqu’ils exercent conjointement l’autorité parentale à l’égard de leur enfant mineur, sont solidairement responsables des dommages causés par celui-ci dès lors que l’enfant n’a pas été confié à un tiers par une décision administrative ou judiciaire.

Autrement dit, lorsque l’enfant se rend coupable d’un fait dommageable, ses deux parents s’ils sont titulaires d’une autorité parentale conjointe seront tenus solidairement à réparer le préjudice de la victime. 

Il n’y a donc plus lieu de s’interroger sur la question de savoir quelle est la résidence habituelle de l’enfant.

Ce n’est que dans l’hypothèse où l’enfant fera l’objet d’un placement par une décision administrative ou du juge des enfants que les parents échapperont à leur responsabilité civile au titre des dommages causés par leur enfant mineur.

Nul doute que si ce revirement de jurisprudence est favorable aux victimes puisqu’elles pourront se tourner vers l’un ou l’autre des parents titulaires de l’autorité parentale, pour être indemnisées, en revanche, cela place le parent titulaire de l’autorité parentale mais chez qui la résidence de l’enfant n’est pas fixée dans une situation difficile puisqu’il aura à répondre au plan civil des actes de son enfant même si, celui-ci ne vivant pas avec lui, il n’est sans doute pas en mesure de surveiller ses agissements, voire de lui fixer des règles ou un cadre pour éviter que, par un comportement inadapté, il occasionne un préjudice à un tiers.

 

L’assurance responsabilité civile chef de famille

 

L’assurance responsabilité chef de famille permet de couvrir la responsabilité civile des parents en cas de fait dommageable de leurs enfants mineurs. Elle est généralement incluse dans l’assurance habitation.

Pensez à faire immédiatement une déclaration de sinistre auprès de votre assureur si votre responsabilité civile est recherchée en tant que parents d’un enfant mineur.

 

Pour aller plus loin :