La Loi du 15 avril 2024 a introduit dans le code civil un nouvel article 1253 et, dans le code rural, un article L 311-1-1 s’appliquant aux activités agricoles.
Avec cet article, le trouble anormal de voisinage entre dans le Code civil.
En effet, la théorie des troubles anormaux de voisinage n’existait pas jusque-là dans le code civil. Ce sont les tribunaux qui avaient créé cette théorie suivant laquelle « nul ne peut causer à autrui un trouble anormal de voisinage ».
Diverses affaires soumises aux Tribunaux avaient fait réagir. Il s’agissait le plus souvent de citadins qui avaient décidé d’aller vivre à la campagne mais qui, très rapidement, ne supportaient plus le chant du coq voisin, ou, à la montagne, le bruit des cloches dont, de tout temps, les vaches locales étaient équipées.
L’on se souvient du coq Maurice devenu le symbole de la ruralité et que ses nouveaux voisins auraient bien fait de vie à trépas.
Il est donc apparu nécessaire au législateur d’adapter le régime des troubles anormaux de voisinage à de nouveaux enjeux révélés par ces différentes affaires.
L’article 1253 du Code civil pose donc en son alinéa 1 le principe désormais bien connu selon lequel « Le propriétaire, le locataire, l’occupant sans titre, le bénéficiaire d’un titre ayant pour objet principal de l’autoriser à occuper ou à exploiter un fonds, le maître d’ouvrage ou celui qui en exerce les pouvoirs qui est à l’origine d’un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage est responsable de plein droit du dommage qui en résulte. »
Jusque là rien de très nouveau !
C’est l’alinéa 2 qui a vocation à mettre un coup d’arrêt aux conflits entre citadins et ruraux en posant le principe suivant lequel le nouvel arrivant ne pourra engager la responsabilité de son voisin sur le fondement du trouble anormal de voisinage lorsque ce dernier provient d’activités quelle qu’en soit la nature, existant antérieurement à l’acte transférant la propriété ou octroyant la jouissance du bien ou, à défaut d’acte, à la date d’entrée en possession du bien par la personne lésée.
En tout cas, il ne pourra agir en responsabilité si ces activités sont conformes aux lois et aux règlements et se sont poursuivies dans les mêmes conditions ou dans des conditions nouvelles qui ne sont pas à l’origine d’une aggravation du trouble anormal.
Autrement dit le nouvel arrivant ne pourra empêcher une activité qui existait déjà sur place quand bien même elle lui occasionnerait un trouble anormal de voisinage dès lors que son voisin respecte les lois et règlements et qu’aucun changement dans cette activité n’aggrave le trouble subi.
Pour les activités agricoles, l’article L 311-1-1 du Code Rural pose le même principe que ci-dessus.
La responsabilité prévue au premier alinéa de l’article 1253 du code civil n’est pas engagée lorsque le trouble anormal provient d’activités agricoles existant antérieurement à l’acte transférant la propriété ou octroyant la jouissance du bien ou, à défaut d’acte, à la date d’entrée en possession du bien par la personne lésée. Ces activités doivent être conformes aux lois et aux règlements et s’être poursuivies dans les mêmes conditions, dans des conditions nouvelles qui ne sont pas à l’origine d’une aggravation du trouble anormal ou dans des conditions qui résultent de la mise en conformité de l’exercice de ces activités aux lois et aux règlements ou sans modification substantielle de leur nature ou de leur intensité.
Le coq Maurice pourra donc répondre à son nouveau voisin qu’il était là avant !
A lire aussi :
- « Petits litiges » : obligation de rechercher une solution amiable avant tout procès
- La perte d’ensoleillement permet-elle de contester un permis de construire ?